Les
Nibelungen
Siegfried,
fils du roi Siegmund de Xanten, termine son apprentissage chez le nain Mime. Il
forge une magnifique épée. Désormais, il peut retourner chez lui, mais
l'ambitieux jeune homme veut se rendre à Worms, capitale des Burgondes, pour conquérir
la belle Kriemhild, sœur du roi Gunther. Traversant une forêt, il triomphe d'un
dragon. Suivant les conseils d'un oiseau, il se trempe dans le sang du dragon
qui le rend invulnérable à l'exception d'un endroit de son épaule où s'est
posée une feuille de tilleul. Son voyage le mène ensuite sur le territoire des
Nibelungen et s'empare du trésor volé aux filles du Rhin par le roi des Nains,
Alberich, ainsi que du heaume magique (en fait un camail) qui lui permet de
prendre n'importe quelle apparence. Déjouant une ruse du méchant nain,
Siegfried le tue mais celui-ci a le temps de maudire tous ceux qui détiendront
le trésor.
Les Nibelungen
Réalisation : Fritz
Lang
Scénario : Thea
von Harbou
Musique : Gottfried
Huppertz, Richard Wagner
Production : Decla-Bioskop
Genre : Aventure,
Fantastique, Drame
Titre
en vo : Die Nibelungen
Pays
d'origine : Allemagne
Langue
d'origine : allemand
Date
de sortie : 14 février 1924
Durée : 288
mn
Casting :
Margarete
Schön : Kriemhild de Burgondie
Paul
Richter : Siegfried de Xanten
Hans
Adalbert Schlettow : Hagen de
Tronje
Hanna
Ralph : la reine Brunhild
d'Islande
Theodor
Loos : le roi Gunther de
Burgondie
Gertrud
Arnold : la reine Ute de Burgondie
Georg
John : Mime, le maréchal-ferrant
/ Alberich le Nibelung / Blaodel (le frère d'Attila)
Hans
Carl Mueller : Gerenot de
Burgondie
Erwin
Biswanger : Giselher de
Burgondie
Bernhard
Goetzke : Volker d’Alzey
Hardy
von François : Dankwart
Frida
Richard : la liseuse des runes
Yuri
Yurovsky : le prêtre
Iris
Roberts : l'enfant
Fritz
Alberti : Dietrich de Bern
Hubert
Heinrich : Werbel
Rudolf
Klein-Rogge : le roi Attila
Georg
August Koch : Hildebrandt
Rudolf
Rittner : Rüdiger de Bechlarn
Grete
Berger : une femme du peuple des
Huns
Mon
avis : Après vous avoir parler de ces
deux petits bijoux du cinéma expressionniste allemand que sont Nosferatu
le Vampire et Le Golem,
intéressons nous, a présent, a celui qui restera a jamais comme étant le plus
grand des réalisateurs germaniques, je veux, bien entendu, parler du célèbre
Fritz Lang et, en guise d’entrée en matière, débutons par ce qu’il faut bel est
bien appeler un chef d’œuvre, Les
Nibelungen. Longtemps invisible et auréolé d’une sombre réputation du fait
de sa récupération par le Troisième Reich, ce dernier est un monument absolu,
que dis-je, un chef d’œuvre intemporel du Septième Art qui cent ans après sa
sortie demeure toujours aussi époustouflant et moderne. Datant de 1924, Les Nibelungen qui s’ouvre sur l’intertitre
Au peuple Allemand, est, sans
conteste, un éloge du nationalisme allemand, ce, dans un contexte tourmenté de
crise financière et politique dans un pays encore marqué par sa défaite durant
la Première Guerre Mondiale et qui avait besoin de héros pour redorer son
blason. Ainsi, alors que Fritz Lang s’exile vers les États-Unis dès 1933 et
l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler, peu
après la sortie du Testament du Docteur
Mabuse qui sera interdit par le nouveau régime, l’État Nazi ressort alors
la première partie du film, Siegfried,
dans une version sonorisée, raccourcie et modifiée pour mieux coller à son
idéologie, ce, tout en dédaignant la seconde partie, bien plus ambigüe. Encore
présenté de nos jours comme étant un film de propagande par des historiens, il
serait toutefois regrettable de ne le réduire qu’à cet aspect tant la dimension
artistique du film semble avoir inspiré une part importante du cinéma mondiale,
de l’Heroic Fantasy en passant par le fantastique. Ainsi, ce qui saute aux yeux
du spectateur en 2024, c’est, tout d’abord, l’effarante modernité de l’œuvre :
tout y est déjà ! Les scènes d’action sont incroyablement rythmées et lisibles,
les effets spéciaux, pour l’époque, demeurent des moments de bravoure
stupéfiants entre ce dragon cracheur de feu long de sept mètres, une insensée
mer de flammes protégeant le royaume de Brunhild, un dessin animé, Le rêve du Faucon, prédisant la chute de
Siegfried tout comme cet arbre en fleur, symbolisant la vitalité du héros, qui
dans un plan incroyable se transforme peu à peu en un crâne symbolisant sa
mort… Aussi bien inspiré par l’expressionnisme allemand et les toiles de
maîtres comme Casper David Friedrich que par les autres films colossaux de
l’époque, Les Nibelungen déploient
des décors somptueux et gigantesques réalisés notamment par le chef décorateur
Otto Hunte, et qui avaient d’ailleurs subjugué un jeune visiteur du tournage,
un certain Alfred Hitchcock. Des décors majestueux qui seront d’ailleurs
réellement brûlés lors du final apocalyptique se déroulant durant la seconde
partie, La Vengeance de Kriemhild.
Oublié par l’État Nazi, ce second volet dépeint la terrible vengeance de la
femme de Siegfried prête à tous les sacrifices et compromissions pour se venger
de ses propres frères qui avaient assassiné le héros. Tourné en grande partie
de nuit, fait rare à l’époque, ce final dépeint une véritable hécatombe causée
aussi bien par l’inutilité d’une vengeance que par une loyauté inflexible qui
se paye ici particulièrement cher. Inspiré de la Chanson des Nibelungen, récit médiéval utilisé au début du
vingtième siècle pour symboliser le nationalisme allemand, l’œuvre de Lang
prend toutefois ses distances de l’opéra de Richard Wagner. En effet, ici point
de dieux mais seulement des hommes et des femmes (qui tiennent ici des rôles
prépondérants), tour à tour héroïques et fidèles mais aussi lâches et
machiavéliques. Soutenu par une formidable bande originale signée Gottfried
Huppertz et de grands acteurs du cinéma allemand de l’époque comme le Docteur
Mabuse Rudolf Klein-Rogge ici en Attila, Les
Nibelungen s’avère être une réussite totale et grâce à la restauration
délicate réalisée se montre ici sous son plus beau visage et dans une version
sans doute proche de l’originale. Un régal de cinéphile à ne louper sous aucun
prétexte !
Points
Positifs :
-
Un monument absolu du Septième Art qui n’a strictement rien perdu de sa force
un siècle après sa sortie. Grandiose, stupéfiant dans sa conception, d’une
longueur peu commune pour l’époque, d’une richesse étonnante, servi par des
décors magnifiques et un casting cinq étoiles, Les Nibelungen s’avère être un des plus grands films de l’histoire
du cinéma allemand, ce, tous genres confondus.
-
Inspiré par la Chanson des Nibelungen,
récit médiéval germanique datant du début du Moyen-âge mais aussi par l’opéra
de Richard Wagner, Les Nibelungen
s’avère être une excellente adaptation dont la principale différence est que,
ici, l’accent est mis sur les protagonistes humains du récit tandis que les
dieux, eux, brillent par leur absence.
-
Un film, deux parties, Siegfried et La Vengeance de Kriemhild. En tout, près
de cinq heures de pur bonheur pour une œuvre tout simplement intemporelle.
-
Des décors tout simplement somptueux, une audace visuelle de tous les instants,
des effets spéciaux étonnants pour l’époque, sans oublier, le coté expressionniste
qui fait de ce film un des plus beaux représentants du genre.
-
Un casting, pour l’époque, naturellement, que l’on peut qualifier de cinq
étoiles avec de grands noms du cinéma germanique comme Margarete Schön, Paul
Richter, Hans Adalbert Schlettow, Hanna Ralph, Theodor Loos et Friedrich Rudolf
Klein-Rogge pour ne citer que les plus connus.
-
Si l’intrigue peut apparaitre comme étant plutôt simple, a priori, puisque celle-ci
s’inspire d’une célèbre légende germanique, le scénario est nettement plus
ambigu qu’on pourrait le penser de prime abord.
-
Un long métrage qui aura inspiré bien d’autres œuvres du même genre et à qui la
Fantasy moderne doit énormément, c’est un fait !
Points Négatifs :
-
Bien entendu, Les Nibelungen n’est
absolument pas un film destiné au grand public et il faut reconnaitre que, avec
son siècle d’existence, celui-ci, actuellement, n’est uniquement destiné qu’à
une petite frange du public que l’on qualifiera de connaisseurs…
-
Certains risquent de voir dans ce long métrage une œuvre de propagande qui,
finalement, servira énormément l’état Nazi. Naturellement, les choses sont bien
plus compliquées qu’on pourrait le penser de prime abord…
Ma note : 9,5/10
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